Nicolas Baudy

Publié le 12 May 2017 à 15:37 Mis à jour le Publié le 12 May 2017 à 15:37 pour le site

 

Des débuts dans le conseil 

Je suis né à Paris et j’ai fait HEC.  Mes disciplines favorites étaient psychanalyse et cinéma donc rien ne me prédestinait à tomber dans la technologie ! Après HEC, je suis rentré dans le conseil (Deloitte). C'était intéressant d’optimiser le fonctionnement des sociétés mais il manquait le côté « faire ». Je suis donc parti chez Havas Voyages à la tête du département “Organisation et Nouvelles Technologies”. Il fallait organiser les processus et les systèmes pour que l’entreprise fonctionne plus efficacement. Je me suis pris au jeu de la technologie car c’était le début avec le lancement d’un service minitel puis d’un site Internet. On était au tout début d’internet !

J’ai rapidement pris conscience que les utilisateurs devenaient autonomes et donc que les processus internes devaient être revus. Comment gérer les relations entre les agences et le consommateur, comment partager les dossiers entre les agences et les consommateurs… à l'époque c'était révolutionnaire. 

On a lancé en 1995 Havas Voyage Vacances. C’était la création d’une activité en partant d’un embryon. Il a fallu acheter, développer les spécifiques et déployer le système de commercialisation en 7 mois! … Un très gros challenge.  La technologie doit s’adapter et non l’inverse ! La technologie a une capacité infinie. Il faut juste hiérarchiser les besoins et piloter. 

J’ai eu la chance d’avoir des services informatiques qui avaient bien compris cet axe et qui m’ont suivi. Les équipes se sont dépassées pour fournir très rapidement une solution très en avance pour l’époque. Au départ quelques millions (de francs) de volume d'affaires et quand j’en suis parti c'était 220 millions (de francs) par an. On peut dire que ca a bien marché ! 

La technologie comme levier pour améliorer la performance 

Après Havas, je suis devenu le 1er DG de Travel Price, en plein boom internet puis j’ai ensuite rejoint Pierre et Vacances.

J’ai ensuite créé “Tous en France” pour promouvoir la France avec ses sites, hôtels … On a cherché à lever des fonds mais la crise de 2008 nous a bloqués et la société a dû cesser ses activités. Ça été dur. Je me suis posé beaucoup de questions après cet échec. Je me suis dit que l’important n’était pas l’argent mais de passer du temps avec les personnes que l’on aime et respecte…  que ça soit dans la sphère privée ou professionnelle. 

Je rejoins alors Voyages-sncf en  2008 appelé par Pierre Alzon. Il fallait entreprendre dans une grosse structure. Il fallait bouger les lignes sur les services auprès des clients, l’innovation, les processus...  Dans les projets innovants, nous avons lancé le projet Hexago. Le but était de permettre aux utilisateurs de trouver leurs hôtels, transports… à partir de leurs intentions. Ils pouvaient chercher “weekend de surf”, “semaine romantique à paris”, … et nous trouvions des offres d'hébergements, des activités, transports, des articles pour répondre à ce type de demande. L’idée était de les aider à définir où ils voulaient aller, définir leurs activités et ainsi de vendre les offres adaptées.  Il existe encore aujourd'hui des opportunités pour des solutions d’aide aux utilisateurs pour trouver des idées de voyages et pour les aider ensuite à l’organiser. C’est nécessaire pour avoir une vraie personnalisation ! 

La tendance de fond est de se rapprocher des clients : moins de distance et en temps réel. Il y a de moins en moins d’intermédiaires. Il faut identifier les chemins critiques, automatiser un maximum de choses, revoir la logistique, optimiser les stocks car un client n’attend plus. Il compare en temps réel les offres et les prix, bien sûr. S’il ne comprend pas l'offre, si celle-ci n’est pas disponible ou trop chère, il part.  Il faut aller jusqu à surveiller en temps réel la concurrence pour réagir immédiatement et automatiquement aux changements de prix ! Il faut aider les organisations à intégrer toutes ces logiques pour être plus efficaces et performantes !

mais jusqu'où améliorer la performance ?

Avec l'Intelligence Artificielle, on sait profiler ou analyser des masses colossales d’infos en temps réel. De nombreux métiers vont être impactés. Les avocats, médecins, traders vont disparaître d’une certaine manière (au moins dans leur définition et usages actuels). Les ruptures se sont faites avec du temps. Mais cette révolution que nous vivons va vite et ne laisse pas de temps à l’adaptation. Cela va créer des fractures et risque de casser la société.  Une partie de la population peut espérer profiter de ces évolutions en maîtrisant ces technologies, avoir accès à l’éternité et la prospérité pendant que ca sera beaucoup plus dur pour une autre partie. C’est une vraie menace de nos stabilités économiques, politiques et sociales.

Nous allons devenir encore plus dépendants des machines. Ca sera aussi indispensable que dangereux. Nous allons oublier comment réaliser des tâches simples  et être incapables de les réaliser en cas de panne...

Les loisirs vont se développer encore plus car d’autres feront le travail, que cela soient des robots, IA… cela va libérer beaucoup de temps. Ce sont donc aussi des opportunités pour le tourisme. 

Les règles économiques vont changer tellement vite que par réaction on peut anticiper la création de  zones sans technologies et en auto-suffisance.   Aller passer quelques jours dans des zones sans technologie sera peut être un loisir répandu !

La vraie question de fond c’est pourquoi on est obligé d’arriver à ce niveau de compétition ? C’est cette compétition qui met une pression très forte pour améliorer, aller plus vite… 

Ce qui amène à optimiser toujours plus, à changer toujours plus vite les processus. Cela crée un monde d'insécurité permanente. Nous n’y sommes pas préparés. Comment réagiront les nouvelles générations à cela ? Vont-ils être plus habitués que nous aux changements permanents ?  On peut espérer qu’ils soient mieux armés que nos générations. Ils vont devoir être optimistes, avoir confiance en eux et malins pour ne pas faire que gérer ce stress mais savoir vivre dans ce monde.  La capacité à s’adapter réside dans sa liberté et son autonomie.